Une enseignante en adaptation scolaire amène ses élèves à se dépasser par l’entremise d’un projet entrepreneurial aux accents écologiques.
Un tawashi est une lavette tissée d’inspiration japonaise qui remplace les éponges synthétiques. C’est aussi, pour une classe de l’école primaire Saint-Viateur-Clotilde-Raymond, à Saint-Rémi, une immense source de fierté. L’enseignante Michelle Beaudin se souvient de cette douzaine d’élèves, âgés alors de 6 à 9 ans, avec qui elle a mis sur pied MiniRecy, une entreprise environnementale spécialisée dans la fabrication de tawashis. «J’aborde les différentes matières scolaires par le biais de l’entrepreneuriat. Par exemple, pour les mathématiques, je les fais manipuler des factures que nous recevons et produisons en lien avec MiniRecy», explique celle qui a piloté plusieurs initiatives du genre dans les dernières années.
MiniRecy voit le jour au début de l’année scolaire 2017-2018. À ses débuts, l’entreprise fabrique des tawashis à base de tissus recyclés obtenus auprès d’un commerce de Saint-Jean-sur-Richelieu qui, autrement, envoie ses restants à la poubelle. Sous l’impulsion de Zakary, le président de la classe dûment élu, le projet prend rapidement une autre tournure. «Nous nous sommes mis à fabriquer des tawashis en ratine pour se laver, d’autres en nœuds papillon... Des kilomètres de bandes de tissus y sont passés!», raconte Michelle Beaudin. L’entreprise a même fait l’objet d’un encart dans la revue Ricardo à l’automne 2018. Les efforts des élèves sont récompensés : chaque dollar amassé à la suite de la vente de tawashis est réinvesti dans l’achat de matériel pédagogique adapté.
Il faut savoir que chacun des «Champions de Madame Michelle» souffre d’un trouble du développement du langage plus ou moins sévère. Plusieurs sont aux prises avec des problèmes moteurs. «Quand on croit en eux et qu’on leur donne les moyens de se réaliser, ils sont capables de grandes choses. Ça fait 23 ans que j’enseigne et que je le répète : tu peux trébucher dans les cailloux qui parsèment ton chemin ou tu peux les prendre pour bâtir quelque chose», souligne l’enseignante en adaptation scolaire.
Michelle se fait un point d’honneur de ne pas entraver la créativité de ses élèves. «Je n’agis pas comme s’ils étaient des enfants. Je les laisse voter, tout en les ramenant dans le droit chemin au besoin», précise-t-elle. À son avis, cette liberté, sur fond de grandes responsabilités, fait la force de MiniRecy. «Ils savent qu’ils manient du vrai argent et que leurs décisions ont une incidence sur le projet. C’est à la fois très stimulant et motivant pour eux», pense Michelle Beaudin. Les résultats parlent d’eux-mêmes : certains élèves avec des difficultés langagières au début de l’année scolaire sont capables de lire un discours devant une foule à la fin de celle-ci. Zakary en est la preuve.